CHAPITRE PREMIER – STRATÉGIE ET IDEOLOGIE

La stratégie soviétique
à l’âge classique (1917-1955)

Lorsque les bolcheviks prennent le pouvoir en 1917 en Russie, leur objectif est, tout au moins théoriquement, d’instaurer une société – et non pas un État – d’un type nouveau. Cette société ne saurait se limiter à la seule Russie et, au moins jusqu’en 1919-20, les dirigeants soviétiques sont convaincus que « l’étincelle de la révolution enflammera » l’ensemble du continent européen. En 1920, ces espoirs déçus n’empêchent pas les nouveaux dirigeants de penser la Russie comme le laboratoire d’une nouvelle société. Il convient alors de repenser le mode de fonctionnement de tout un État – destiné, selon Marx et surtout Engels, à disparaître – et de tous ses appareils. L’armée est naturellement l’un de ces appareils d’État sur lequel il convient de réfléchir en ce qu’il doit également permettre de garantir la survie de la révolution bolchevique. L’organisation de l’armée est ainsi au premier plan des préoccupations des dirigeants du Soviet de Petrograd. Mais très vite d’autres questions apparaissent : celle de la doctrine militaire du nouvel État, puis de sa stratégie. Les années vingt et, dans une moindre mesure, les années trente, ont ainsi été particulièrement riches en débats sur les questions militaires, des débats également marqués par une liberté d’expression que l’on ne retrouvera plus ultérieurement.

Lecteur assidu de Clausewitz5, Lénine concevait la guerre comme la continuation de la politique par d’autres moyens. Mais à la célèbre formule de Clausewitz, le « père » de la révolution bolchevique russe ajoutait que la guerre était la continuation tant de la politique intérieure que de la politique extérieure. La dimension sociale des rapports de force – ou plus précisément de la « corrélation des forces » – est en effet une constante de la pensée militaire soviétique. Car, selon Lénine, des guerres surgissent les révolutions qui font avancer le cours de l’Histoire jusqu’à son étape ultime : l’instauration du communisme dans le monde6. Cette analyse théorique fera office de position officielle pour expliquer que la révolution de 1917 est le fruit de la Première Guerre mondiale ; comme les doubles révolutions « anti-féodales » et « anti-capitalistes » en Europe et en Chine sont les fruits de la Seconde Guerre mondiale. Ces deux guerres mondiales résultant quant à elles de l’affrontement inéluctable entre les puissances impérialistes.

Mais la révolution bolchevique est aussi confrontée à un autre dogme issu du marxisme, celui de la disparition de l’État et de ses appareils. Or, l’armée constitue l’un des principaux appareils d’État. Il conviendrait donc logiquement de prévoir sa suppression. Le jeune État bolchevique tente d’appliquer ces thèses marxistes orthodoxes dans les premières semaines qui suivent la prise du pouvoir. Mais très vite, face à l’ampleur de la tâche et face à la guerre qui se poursuit sur plusieurs fronts, les dirigeants soviétiques prennent conscience que la thèse du dépérissement de l’État n’est guère applicable, au moins dans l’immédiat. Dès le début de 1918, sont ainsi restaurés les principaux appareils de l’État et notamment l’armée.

L’organisation de l’armée

Le 15 (28) janvier 1918, le Conseil des Commissaires du Peuple publie un décret sur la création d’une « Armée Rouge des Ouvriers et des Paysans » (RKKA). Celle-ci est destinée à soutenir le nouveau régime mais aussi les révolutions socialistes qui ne manqueront pas de se développer en Europe7. Léon Trotski devient le premier commissaire du peuple (ministre) aux affaires militaires. Il est chargé de l’organisation de cette armée – même si l’historiographie stalinienne a attribué cette paternité à… Staline ! Or, Trotski est conscient qu’un armée doit être commandée et que personne ne peut s’improviser chef militaire. Par un décret du 19 mars 1918, il décide de faire appel aux officiers de l’armée impériale qui « acceptent », plus ou moins volontairement, de se rallier au nouveau régime. Ce seront les « spécialistes militaires » (voenspets). Mais ces officiers d’ancien régime, quel que soit leur grade, sont aussi considérés comme idéologiquement douteux. Ils seront par conséquent systématiquement contrôlés par des « commandants politiques » (politruk) grâce à l’instauration du principe du « double commandement ». Selon ce principe, tout ordre donné par un officier, à quelque niveau hiérarchique que ce soit, doit être avalisé par le commandant politique. Le double commandement, instauré en 1919, est aboli en 1924 ; il est rétabli de 1937 à 1940 lors de la grande purge dans l’armée, puis de juillet 1941 à octobre 1942 lorsque les survivants de ces purges sont sortis de leurs camps pour monter au front à la suite des premières défaites de l’armée rouge. Entre ces périodes, et depuis 1942, le double commandement ne s’est pas exercé en URSS, les dirigeants soviétiques considérant que leurs officiers – tous membres du PCUS – étaient politiquement « sûrs » et n’avaient plus besoin d’un contrôle politique des ordres militaires en vertu du principe du « commandement unique ». Il convient enfin de préciser que les Politruk ne doivent pas être confondus avec les officiers politiques, chargés de la formation et du contrôle politique des personnels militaires mais qui ne prennent pas directement part au commandement militaire. Ces officiers politiques, créés en même temps que les politruk, subsistent quant à eux sans interruption jusqu’en septembre 1991.

Ce n’est donc véritablement qu’à partir de 1921-22, après la fin de la guerre civile et de « l’intervention étrangère », que les Soviétiques commencent à réfléchir sur les questions d’organisation de l’armée et de doctrine militaire. Le commissaire aux affaires militaires, Léon Trotski – une « non-personne » dans l’historiographie soviétique – est alors confronté à deux grandes questions : la nature de l’armée et la relation entre l’armée et la politique.

La première question est résolue de manière quasi naturelle. En 1922, le jeune État soviétique ne peut, pour des raisons économiques, mettre en place une véritable armée de masse comme certains, tel Toukhatchevski, le souhaitent. C’est donc, dans un premier temps, une petite armée régulière, doublée d’une milice territoriale, qui se substitue aux troupes de l’armée rouge qui sont progressivement démobilisées. Entre 1921 et 1924, les effectifs de la « première » armée rouge passent ainsi de 5,5 millions à 562 000 hommes, augmentés de 42 divisions de milices territoriales. De telles forces, peu nombreuses et surtout mal équipées, « ne pouvaient par conséquent assurer que des fonctions défensives limitées ». Mikhaïl Frounze, qui vient alors de succéder à Trotski, reconnaît lui même en 1925 : « Si nous avions le choix entre une armée de 1,5 à 2 millions d’hommes et le système actuel des milices, d’un point de vue militaire, tout plaiderait en faveur de la première solution. Mais nous n’avons pas le choix. Le système de milice, combiné avec des unités d’encadrement, permet sans aucun doute de garantir la sécurité du pays » 8. Ces choix tiennent certes à la priorité accordée, en ces années de NEP, à la reconstruction de l’économie soviétique mais aussi à l’instauration, durant ces mêmes années, de la première période de « cohabitation pacifique », temporaire, entre les deux systèmes antagonistes. Dans ces conditions, le Kremlin n’envisage, dans l’immédiat, ni la poursuite de « l’exportation armée de la révolution » – après l’échec subi en Pologne – ni d’avoir à se défendre d’une offensive des puissances « impérialistes » contre le nouvel État soviétique.

À partir de 1926-27, la NEP ayant fait ressentir ses premiers effets positifs, le pouvoir soviétique peut envisager la montée en puissance de l’armée rouge, en termes d’effectifs comme de moyens. Le budget de la défense augmente de près de deux fois entre 1924 et 1927 pour atteindre 12,7 % du budget de l’État. En décembre 1926, est adopté un plan de construction navales pour les années 1926-32 qui prévoit la modernisation de la flotte existante et la construction de 12 sous-marins9. Mais le changement intervient réellement en 1927, lorsque Staline devient de fait le seul maître en URSS et annonce la fin de la NEP et de la « période de cohabitation pacifique »10. Néanmoins, si la période d’ouverture de l’économie soviétique s’achève en cette année 1927, il n’est pas question de mettre un terme – fin de la « cohabitation » oblige – à la montée en puissance de l’armée rouge. Au cours de cette même année sont ainsi lancés les premiers programmes d’armements, nécessaires à la mise en œuvre d’une stratégie nouvelle qui commence à voir le jour (voir plus loin).

Armée, politique et doctrine militaire

Avant d’aborder les questions de stratégie proprement dite, les Soviétiques devaient répondre à la seconde question qui se posait à eux : celle concernant les liens entre l’armée et la politique. Cette question a fait l’objet de débats importants qui ont eu des effets incontestables sur la nature des futurs concepts stratégiques encore en germe. Sans entrer ni dans les détails ni dans les nuances, on peut considérer que ces débats ont vu s’opposer deux thèses. La première est défendue par le commissaire du peuple aux affaires militaires, Léon Trotski, soutenu par un ancien général de l’armée tsariste, Alexandre Svetchin. Cette thèse réfute le fait qu’il puisse y avoir une doctrine militaire, et à plus forte raison une stratégie, spécifiquement prolétarienne, marxiste-léniniste. Paradoxalement, le père du concept de « révolution permanente » estime notamment qu’il ne saurait y avoir de théorie militaire purement marxiste : « On ne peut construire un règlement de campagne avec le marxisme », affirme-t-il ainsi lors d’un débat qui se déroule le 1er mars 1922. Il est en cela suivi par le général Svetchin, sans doute pour des raisons différentes de celles de son « ministre ». L’ancien général tsariste – rallié, comme de nombreux autres voenspets, autant par obligation que par volonté de défendre la « Russie éternelle » – réfute la thèse selon laquelle la future guerre ne saurait être que révolutionnaire. Et dans cette perspective, une stratégie n’a pas à s’encombrer des impedimenta d’une idéologie, fût-elle révolutionnaire. Certes, pour cette guerre future, Svetchin propose dans son ouvrage, Stratégie, la désignation d’un « Commandant en chef suprême » – appelé aussi « chef militaire intégral » – qui unifierait tous les pouvoirs – politique et militaire – sur le théâtre d’opération. Il estime en effet qu’un commandant en chef en opération ne peut être « suprême » en ce qu’il « ne maîtrise pas tous les éléments de politique intérieure et extérieure, ni la situation des arrières de l’armée au combat, n’ayant pas le pouvoir dans tout l’État » 11. Svetchin est, sur ce point, soutenu par le futur maréchal Chapochnikov qui, dans son ouvrage paru la même année 1927 – Mozg Armii, le Cerveau de l’Armée – précise, en se référant à Clausewitz : « Le stratège commandant en chef ne commande qu’une partie de l’armée ». Cette idée du « stratège intégral » proposée dans les années vingt et rejetée à l’époque sera en fin de compte reprise implicitement par Staline pendant la « grande guerre patriotique » avec le Comité d’État à la défense (GKO) et la « Stavka VGK » (Grand quartier général) dont il prend la direction.

À ces partisans de la séparation de la stratégie et de la politique (de l’idéologie), s’opposent des hommes qui, comme Frounze et Toukhatchevski, sont favorables à l’introduction d’une doctrine militaire marxiste-léniniste. Paradoxalement, c’est Svetchin qui lance le débat sur la doctrine militaire dans un article qui porte ce titre paru en 1920 dans la revue Voennoe Delo et qui a disparu dans la tourmente de 1937. Mais c’est bien Frounze qui propose, dès 1921, l’élaboration d’une « doctrine militaire unique »12 qui restera une référence pour toute la pensée militaire soviétique et même post-soviétique. Cette doctrine est « unique » en ce qu’elle doit recueillir non seulement l’assentiment de toutes les forces armées13 mais surtout en ce qu’elle doit unifier les points de vue de l’armée, du pouvoir politique et de toute la société soviétique, en un mot, « être l’expression de la volonté unique de la classe sociale au pouvoir » 14.

La définition de la doctrine militaire donnée par Frounze en 1921 sera explicitement reprise jusqu’aux derniers jours de l’URSS. Cette définition, pour le moins condensée, est la suivante : il s’agit des « conceptions adoptées par une armée dans un État donné, établissant le caractère de l’organisation des forces armées de ce pays ; des méthodes de préparation et de conduite des forces au combat sur la base de l’idéologie dominante dans l’État donné ; des objectifs – et des moyens pour les atteindre – auxquels ces forces sont confrontées et qui découlent de la nature de classe de l’État et qui sont déterminés par le niveau de développement des forces productives du pays » 15. Et, surtout, Frounze – sans doute pour nuancer le caractère particulièrement « idéologique » de sa définition mais aussi sans doute pour la clarifier – précise que la doctrine militaire unique comprend deux aspects distincts et complémentaires : un aspect technique et un aspect politique. Le premier concerne toutes les questions d’organisation de l’armée, sa préparation au combat et les méthodes de conduite des opérations, c’est-à-dire toute la partie militaire ; le second aspect se rapporte à la nature du régime politique du pays donné et aux moyens sociaux à la disposition de l’armée.

Après de nombreux débats, cette doctrine est officiellement adoptée lors du XIe Congrès du PC(b)R, en avril 1922. Mais, même au cours de ce Congrès – Staline ne domine pas encore totalement la scène politique soviétique – les débats sur la doctrine continuent. Trotski dira notamment : « Je pense que la doctrine militaire unique et tous ces débats sont secondaires. Plus important et plus difficile serait de faire en sorte que, dans l’armée rouge, il n’y ait plus de poux ! Voilà notre doctrine immédiate… » 16. Quant à Toukhatchevski, il fait taire ses préventions sur les ingérences du politique sur le militaire qu’il avait exprimées en 1920 – notamment à l’encontre de Staline lors de la défaite de Varsovie – pour soutenir Frounze… tout en parlant d’autre chose !

Le cadre idéologique de la pensée militaire une fois fixé, les stratèges soviétiques – l’URSS entrant dans une phase de paix et de reconstruction – peuvent désormais réfléchir sur les concepts stratégiques du nouvel État soviétique.

L’élaboration des concepts stratégiques

Comme pour la doctrine militaire, ce sont encore de « vrais » débats qui se déroulent en URSS au cours des années vingt et qui se poursuivent jusque vers le milieu des années trente. Ces débats portent essentiellement sur trois questions : celle de l’offensive ou de la défensive ; celle de la spécificité de la phase initiale de la guerre et celle de l’opération en profondeur. Sans perdre de vue le caractère « révolutionnaire » de l’État soviétique, les positions des protagonistes sont en effet souvent contrastées et rendues publiques. Elles font également référence aux réflexions de stratèges du passé, russes, mais aussi allemands. Du passé, il ne peut être totalement fait table rase, même si la circonspection reste de rigueur !

Défensive, offensive et phase initiale de la guerre

Dans le débat sur l’élaboration d’une stratégie offensive ou défensive, l’on retrouve les mêmes protagonistes et les mêmes regroupements que dans le débat sur la doctrine : Svetchin prône plutôt la défensive ; Toukhatchevski et, dans une moindre mesure Frounze, plutôt l’offensive. Ces positions tiennent aussi aux conditions dans lesquelles se sont produits le ralliement des anciens officiers tsaristes à l’armée rouge, certains, comme le général Andreï Zaiontchkovski, n’hésitant pas à « faire du zèle » dans le sens de l’offensive révolutionnaire17.

L’idéologie révolutionnaire qui fut celle des années du communisme de guerre est naturellement offensive et volontariste. Que de fois n’a-t-on pas répété dans le jeune État soviétique que la révolution russe devait être l’étincelle qui embrasera le monde ! De cette approche idéologie il découle presque naturellement la nécessité d’élaborer une stratégie offensive destinée à « porter la flamme révolutionnaire » dans le monde – ou tout au moins en Europe. Cette conception d’une guerre qui ne saurait être que révolutionnaire est notamment défendue – au moins dans les débats des années vingt – par Toukhatchevski. Néanmoins, il convient de préciser que si celui-ci s’est rallié volontairement à la cause révolutionnaire, il l’aurait fait, selon de nombreux témoins, non pas tant par conviction marxiste-léniniste que par nationalisme russe. Les bolcheviks lui paraissaient alors les seuls à même de restaurer la puissance de l’empire, perdue par l’impéritie du pouvoir tsariste. Il étaye, dans ces conditions, son argumentation non seulement sur le marxisme-léninisme mais aussi, en se référant à Clausewitz et à sa « stratégie de destruction »18. Certes, Toukhatchevski ne prône pas l’offensive systématique et considère, en 1923, que si « l’offensive est dans la plupart du temps gagnante… la défensive permet de gagner du temps ».

C’est une position presque radicalement inverse que défend dans son ouvrage Stratégie, un Svetchin beaucoup plus nuancé dans ses affirmations. Pour le général russe, la future guerre ne sera pas nécessairement une guerre révolutionnaire ou une guerre de classes et, sans exclure cette possibilité, il considère comme dangereux de se limiter à cette seule hypothèse. Il estime notamment que la future guerre pourrait être « une guerre prolongée exigeant une mobilisation progressive d’énormes ressources et l’effort de tout le peuple ». Il met ainsi en garde les partisans – sous-entendu Toukhatchevski – d’une guerre aux succès rapides et fondée sur la « stratégie de destruction » susceptible de décider de l’issue de la guerre par une série d’opérations offensives rapides. Svetchin prône plutôt une « stratégie d’usure » estimant que l’anéantissement des forces vives de l’adversaire ne saurait être que l’objectif partiel d’une opération et non le but de la guerre19.

Dans cette perspective d’une guerre susceptible d’être prolongée, Svetchin suggère également que « la période initiale de la guerre » soit considérée comme une période spécifique de la guerre. Cette période comprend une « période de prémobilisation » suivie d’une « période particulière » incluant la mobilisation générale, le déploiement et la concentration des troupes précédant les premières grandes opérations. C’est d’ailleurs surtout dans cette phase initiale que Svetchin concevait la mise en œuvre d’une stratégie défensive, faisant référence en cela à la stratégie engagée par Barclay de Tolly et appliquée par Koutouzov en 1812. Cette notion de la « période initiale », qui avait été oubliée à la veille de Seconde Guerre mondiale, deviendra par la suite l’une des constantes de la réflexion stratégique soviétique. Sans pour autant qu’il soit fait référence à l’origine des idées de Svetchin qui avait, il est vrai, actualisé une notion développée initialement par un stratège russe du XIXe siècle, Genrikh (Henri) Leer (1829-1904)20.

Toutefois, durant les années vingt et jusqu’au début de la décennie suivante, sans totalement les rejeter, il ne convenait pas de faire trop explicitement référence aux théories du passé et surtout du passé tsariste. Il faut attendre la reprise en mains du pouvoir politique par Staline pour que soient réhabilitées les idées – tout au moins certaines d’entre elles, soigneusement sélectionnées – et surtout les formes de l’ancienne armée russe, à commencer par le rétablissement des grades et des distinctions sur les uniformes. Dès lors, les généraux victorieux de l’armée impériale seront régulièrement glorifiés jusqu’à l’apothéose d’un culte de Koutouzov – dont Staline se voulait la réincarnation – durant la Seconde Guerre mondiale.

Pourtant, même si Svetchin peut être considéré comme le principal stratège soviétique des années vingt, il sera marginalisé après la publication de son ouvrage en 1927, à un moment où une génération plus jeune prend la relève et propose, à son tour, une véritable réflexion stratégique. C’est en effet à la fin de cette décennie que, tirant les leçons des idées développées par Svetchin, la « jeune garde » des officiers soviétiques établira l’un des éléments essentiels de l’art opératif soviétique : l’opération en profondeur.

Art opératif et opération en profondeur

La notion d’art opératif, sous-jacente depuis 1922, est explicitée par Svetchin dans son ouvrage de 1927 qui précise et développe cette catégorie, propre à la science militaire soviétique. L’art opératif – souvent considéré comme l’équivalent des notions de « grande tactique » ou de « petite stratégie » telles qu’elles existent dans les concepts stratégiques occidentaux – désigne un ensemble d’opérations qui dépassent le seul champ de bataille mais qui ne recouvrent pas la totalité des buts de la guerre. Il concerne la stratégie devant être menée au niveau d’un théâtre d’opération regroupant plusieurs groupes d’armées ou fronts21. Cette catégorie nouvelle de l’art militaire a été immédiatement adoptée par les pouvoirs politique et militaire.

Ainsi, l’Académie militaire Frounze ouvre-t-elle, en mai 1931, une « faculté d’art opératif » dont le premier responsable est le colonel Georgi Isserson22. Simultanément, un groupe d’officiers réfléchit sur les opérations susceptibles de réaliser les tâches de cet art opératif. Les premières ébauches de la réflexion, engagée à la fin des années vingt par des hommes comme M. Toukhatchevski, N. Varfalomeev, I. Ouborevitch, V. Triandafilov… se retrouvent dans le Règlement de Campagne de 1929. Mais c’est V. Triandafilov qui, le premier, exprime le plus clairement l’idée de l’opération en profondeur. Dans un rapport qu’il présente en 1931 à l’état-major général de l’armée rouge, il affirme notamment : « Avec l’utilisation de nouveaux moyens de combat, s’ouvrent des possibilités d’attaques simultanées contre l’adversaire dans toute la profondeur de son dispositif tactique ; des possibilités d’emploi simultané de plusieurs échelons de chars et d’infanterie avec un soutien d’artillerie et d’aviation attaquant l’adversaire jusqu’à ses premières lignes de défense. Cette frappe puissante aura donné à l’attaque rapidité et impétuosité. L’action tactique en profondeur sur les unités combattantes de l’adversaire a aussi ouvert les perspectives de l’art opératif ; elle a créé les conditions pour la préparation et la conduite des opérations modernes sur un vaste espace » 23.

Ces idées seront reprises par la « jeune garde » des officiers soviétiques qui, derrière Toukhatchevski, cherchent à faire de l’armée rouge une armée moderne préparée à la guerre future. Toukhatchevski, nommé en 1931 commissaire adjoint aux affaires militaires et directeur de l’armement, met alors tout en œuvre pour que l’armée rouge soit dotée de l’équipement nécessaire pour mener ces « opérations en profondeur »24. C’est dans cette perspective que la production de chars et d’avions augmente dès cette époque pour atteindre son apogée en 1937. De plus, le champ d’application de l’opération en profondeur va progressivement s’étendre : prévue initialement – au début des années trente – pour être appliquée au niveau de l’armée, elle est élargie, dans la seconde moitié de la décennie, au groupe d’armées puis au front dans son ensemble. Toutefois, cette vision de la guerre future ne satisfait pas les « idéologues » de l’armée rouge et notamment le successeur de Frounze à la tête du commissariat du peuple, Kliment Vorochilov, adversaire, comme Staline, de Toukhatchevski depuis la guerre russo-polonaise. Mais aussi, pour des raisons moins idéologiques, d’autres opposants à l’opération en profondeur se manifestent dans ce débat et notamment le futur maréchal Boudenny, officier de cavalerie, qui apprécie peu de voir de fait son arme marginalisée, dévalorisée.

Malgré ces oppositions, l’idée semble avoir été admise par la majorité de l’état-major si l’on en croit les grandes manœuvres organisées en 1935 dans la région du Dniepr en Ukraine et axées autour de l’expérimentation de l’opération en profondeur. Ces manœuvres ont impressionné les observateurs étrangers qui sont alors convaincus que l’armée rouge est parfaitement prête pour une guerre de grande envergure. Mais ceci se déroulait avant que ne débute la grande purge de 1937 qui allait détruire non seulement les hommes mais aussi les idées et les moyens pour les mettre en œuvre.

Car Toukhatchevski ne s’est pas contenté de la seule rénovation des idées. En tant que responsable de l’armement, il a également engagé un processus de modernisation des moyens. Ces moyens nouveaux consistent naturellement en un développement rapide de la production de chars et d’avions, mais aussi en une amélioration de la technique du parachutage, autre moyen essentiel de l’opération en profondeur. Deux types de chars sont alors développées dans ces années trente : le T.34, considéré comme l’un des meilleurs chars de la Deuxième Guerre mondiale et le char lourd « KV » (Kliment Vorochilov). Mais à la veille de la guerre, une partie importante de ces matériels notamment les chars étaient en révision longue ou moyenne. Il est vrai que, après la purge de 1937, Staline, qui ne croyait pas aux chars ni, suivant l’avis de Vorochilov, à l’opération en profondeur, avait aussi désorganisé la production d’armement mise en place par les officiers éliminés. Et ce, malgré la bataille de Khalkin Gol (20-31 août 1939) contre les Japonais – considérée a posteriori comme le premier exploit du vainqueur de la Seconde Guerre mondiale – et au cours de laquelle le général Joukov met en pratique, au moins en partie, la théorie de l’opération en profondeur, faisant un emploi massif des chars.

Mais la volonté destructrice de Staline est allée encore plus loin. En effet, Toukhatchevski, sans doute Russe avant d’être Soviétique, avait pensé non seulement les armes de la prochaine guerre mais celles des guerres pour un avenir plus lointain. Il s’est notamment intéressé de très près, à partir de 1931, lorsqu’il devient directeur de l’armement, à la construction d’un engin de bombardement susceptible d’effectuer un vol stratosphérique. Cet intérêt s’inscrit pleinement dans la logique de la réflexion globale de Toukhatchevski qui recherche d’abord la vitesse, la surprise et l’invulnérabilité tout en tenant compte des contraintes géopolitiques de l’URSS. Cet intérêt pour les armes de l’avenir le met alors en contact avec un jeune ingénieur, Sergeï Korolev, qui, en 1931, commence à réfléchir sur les plans d’une fusée25. Mais, dans ce domaine aussi, la grande purge de 1937-38 marque un coup d’arrêt. Korolev, accusé de collusion avec le « groupe trotskiste » de Toukhatchevski, est arrêté en juin 1938. Les recherches sur la balistique sont interrompues jusqu’en 1944, c’est-à-dire jusqu’au moment où les Allemands effectuent leurs premiers tirs de V1.

Or, cette réflexion sur les fusées est en parfaite coïncidence avec la culture stratégique russe. Dès le début du XIXe siècle, au lendemain de la « guerre patriotique » de 1812, est développée une réflexion sur les armes de jet et l’extension de l’artillerie. C’est en 1820 que, à l’initiative de Barclay de Tolly, est fondée « l’Académie d’artillerie et de balistique »26, reflet évident de la préoccupation d’une puissance qui pense aux armes d’un champ de bataille continental. C’est cette même vision qui est reprise à partir de 1944 puisque, en URSS, les missiles sont d’abord conçus comme une extension de l’artillerie et non, comme aux États-Unis, de l’aviation. La purge de l’armée met donc un terme à toute la « révolution dans la chose militaire » qui s’était engagée depuis les années vingt, révolution dans la réflexion stratégique comme dans l’armement. Dès la fin des années trente, commence à se développer le culte de la personnalité qui conduira à rapporter tout succès au « génie stratégique » du guide suprême : Staline.

Staline : le « plus grand stratège
de tous les temps »

À partir de 1937, la réflexion dans le domaine stratégique, comme dans les autres domaines, se tarit en URSS. Toute science devient science marxiste-léniniste et Staline est son grand maître. Ce n’est qu’après les premiers revers de l’armée rouge en 1941-42 que Staline tente de donner, lui-même, un nouvel « élan » à la stratégie, faisant appel aux idées développées par des Svetchin, des Toukhatchevski et quelques autres, tout en se gardant bien de faire explicitement référence à ces « ennemis du peuple ». La conception stratégique de Staline a été énoncée successivement en 1942 et en 1946 ; une conception qui est plus une explication a posteriori d’une situation difficile que le fruit d’une véritable réflexion stratégique.

Le 23 février 1942, lors de la première fête de l’armée rouge après le début de la guerre et alors que les forces soviétiques sont en pleine déroute, Staline promulgue le « décret du commissaire du peuple à la défense n° 55 » dans lequel il établit une distinction entre les « facteurs temporaires et le facteurs permanents déterminant l’issue d’une guerre » 27. Théorie on ne peut plus d’actualité puisqu’elle consiste d’abord à démontrer que la Blitzkrieg dont l’URSS, après d’autres, a été la victime en 1941 est naturellement le fruit d’une surprise qui ne saurait être considérée comme un facteur permanent. En d’autres termes, les premières défaites de l’armée soviétique ne laissent en rien présager une éventuelle victoire finale de l’Allemagne : les victoires allemandes ne peuvent être que temporaires car elles s’appuient sur des éléments tels que « la surprise, le déploiement du potentiel militaire, la mobilité des armées ». Or, ces éléments sont sans effets au-delà de la période initiale de la guerre s’ils ne sont relayés par des « facteurs permanents » – sous-entendu que l’URSS possède et non l’Allemagne – tels que : « la solidité des arrières, le moral de l’armée et de la population, le nombre et la qualité des divisions, l’armement et la capacité d’organisation du commandement » 28. Tel est le premier élément de « l’apport essentiel » du guide suprême à la science militaire. Cette « théorie des facteurs permanents et temporaires » reviendra ainsi comme un leitmotiv dans la littérature militaire soviétique jusque vers le milieu des années cinquante. Mais cette théorie est d’abord une théorie politique et ne saurait être considérée comme le reflet de la stratégie soviétique de l’époque. En effet, surtout après la fin de la guerre et avec le développement de l’arme atomique, l’élément de surprise est particulièrement prisé par des stratèges encore largement soumis à un strict contrôle politique.

Le deuxième « apport » de Staline à la science militaire est tout autant, sinon plus, rétrospectif et dogmatique qui le premier. Il consiste à établir une distinction entre les guerres de la « période manufacturière » et celles de la « période mécanisée ». Cette distinction est établie par Staline dans sa réponse à une lettre qui lui a été envoyée en février 1946 par un de ses officiers – le colonel Razin29. Là encore, il s’agit d’assumer, en termes idéologiques, la reprise des idées avancées par Toukhatchevski et de les attribuer au « plus génial stratège de tous les temps ». Pourtant, cette distinction est pour le moins simpliste et factice puisqu’elle reprend l’opposition, déjà effectuée par Lénine, sinon par Hobson et Hilferding, entre capitalisme concurrentiel et capitalisme monopoliste (impérialisme).

Seuls les Soviétiques, et notamment le premier d’entre eux, ont compris que l’on ne pouvait faire la guerre comme elle avait été pensée par les stratèges – notamment allemands – du XIXe siècle qui pensaient une guerre aujourd’hui dépassée. Mais le « grand Coryphée de la science militaire » a compris que la guerre devait désormais passer à une phase mécanisée ce qui a permis à l’armée rouge de battre une armée allemande qui appliquait une stratégie dépassée. Se référant aux Moltke, Schlieffen, Luddendorf, Keitel et d’autres, Staline affirme ainsi – car, il s’agit d’abord de critiquer tout ce qui vient d’Allemagne – que au cours des « trente dernières années, l’Allemagne a été à l’origine de deux conflits sanglants … et par deux fois a été vaincue ». Et l’Allemagne a été vaincue car ses généraux fondaient leur stratégie sur les enseignements de Clausewitz, théoricien de la « période manufacturière ». Mais cette « théorie » de Staline a aussi pour fonction de critiquer quiconque – et, en 1946, il convient d’entendre les États-Unis – chercherait à mettre en œuvre une stratégie inspirée de Clausewitz et fondée sur la surprise. En d’autres termes, là encore la fonction de ce discours « stratégique » est d’abord d’ordre politique.

Enfin, le dernier dogme instauré par Staline et considéré comme infaillible, est celui des étapes de la stratégie soviétique. Une stratégie héritée de la pensée russe – et surtout pas allemande – et notamment de celle de Koutouzov – et surtout pas de Barclay – un Balte d’origine écossaise ! Là encore, l’on assiste à une réécriture de l’histoire et à son exploitation a posteriori destinée notamment à justifier les défaites de 1941-42. Durant la Seconde Guerre mondiale, l’URSS a, selon Staline, mis en œuvre une stratégie comprenant trois phases successives : la « défense stratégique active en profondeur », la « contre-offensive stratégique » et les « opérations stratégiques offensives ». Ce que ne dit pas Staline est que, en 1812, ces trois phases avaient été plus ou moins consciemment préparées alors qu’en 1941, l’URSS est prise au dépourvu, même si, rétrospectivement, l’on trouve les mêmes principes dans les deux cas.

À côté de ces discours destinés à alimenter la propagande en faveur du généralissime, quelle stratégie a été appliquée durant la guerre ? Mal préparée et surtout désorganisée après les purges de 1937, l’armée rouge se laisse surprendre par l’attaque de 1941. Dès lors, et devant l’urgence, l’on fait sortir des camps les officiers ayant survécu aux purges afin de renforcer l’encadrement de l’armée rouge. Ces officiers seront d’ailleurs à leur tour encadrés par les politruk que l’on restaure pour l’occasion. Après avoir « laissé » la Wehrmacht pénétrer dans la profondeur du territoire soviétique, l’armée rouge prépare la contre-offensive et, disposant des moyens qui lui ont manqué en 1941, peut mettre en œuvre les théories développées dix ans plus tôt. Le premier exemple de l’application de l’opération en profondeur est celui de la bataille de Koursk (juillet-août 1943) qui est considérée par l’historiographie soviétique comme le moment où l’URSS reprend l’initiative stratégique. « Dans la bataille de Koursk ont été développés l’organisation de l’interaction stratégique entre les groupes de fronts, l’utilisation des réserves stratégiques pour changer le rapport des forces en sa faveur. A été acquise une nouvelle expérience de concentration de forces et des moyens dans une direction décisive. Ont tout d’abord été utilisées les blindés dans leur nouvelle organisation, comme échelon vers la victoire. L’aviation soviétique a fini par obtenir la maîtrise du ciel » 30.

Pourtant, si les théories développées dans les années vingt et trente ont finalement permis à l’URSS de l’emporter sur l’Allemagne, ces mêmes théories sont vite oubliées – au moins officiellement – au lendemain de la guerre pour en venir à une vision totalement doctrinaire de la stratégie qui ne peut s’éloigner des grands principes énoncés par Staline. Durant les dernières années du stalinisme, toute réflexion est en effet bloquée, et ce, malgré l’apparition d’armes nouvelles : atome et fusées. Que pouvaient en effet peser de telles « révolutions » dans l’armement face aux théories émises par le « génial » Staline ? Certes, il convient de relativiser cette absence de réflexion sur les conséquences de l’apparition l’atome dans la guerre, au regard de l’absence de réflexion dans les autres grands pays31. Mais il n’en demeure pas moins que la réflexion stratégique en URSS se trouve gelée. C’est seulement après la mort de Staline que, timidement, une réflexion sur la guerre future peut reprendre.

Ce gel de la pensée stratégique est particulièrement manifeste lors de la célébration du soixante-dixième anniversaire de Staline au cours de laquelle l’on assiste à une véritable débauche de discours sur son « génie stratégique ». Pourtant, certaines voix se font entendre dès 1947 sur les perspectives de la sécurité internationale. Un académicien soviétique d’origine hongroise, Evgeni (Jenö) Varga estime en effet que, tirant les leçons de la Seconde Guerre mondiale, les « impérialistes » hésiteront à engager une guerre contre l’URSS et ses alliés en raison du changement de la « corrélation des forces » intervenu après 1945. Il en déduit que la guerre entre les deux systèmes n’est plus inévitable comme il était pourtant établi par le dogme instauré par Lénine lui-même. Mais il estime aussi qu’une guerre « inter-impérialiste », comme le furent la Première et la Seconde Guerre mondiale, n’est plus, elle non plus, inévitable. Varga dispose alors d’un fort soutien politique et le sort de ses idées reste étroitement lié au destin de son protecteur : Georgi Malenkov.

L’idée d’une non-inévitabilité des guerres entre les deux systèmes suivra ainsi son cours et finit par être admise par Staline lui-même lors de sa dernière intervention en octobre 1952. Il est vrai que, en 1952, Malenkov, qui avait subi une éclipse entre 1948 et 1950, est revenu en cour et qu’il est alors considéré comme le dauphin de Staline. C’est à partir de ces considérations que les Soviétiques vont instaurer, dès le lendemain de la mort de Staline, le 5 mars 1953, le dogme de la coexistence pacifique entre les deux systèmes. Ce dogme, repris à son compte par Nikita Khrouchtchev est érigé en « ligne générale de la politique étrangère soviétique » lors du XXe Congrès du PCUS (1956). La coexistence pacifique entre les deux systèmes antagonistes a été rendue possible par l’évolution du rapport des forces dans lequel l’arme atomique tient une place essentielle. Dans le débat stratégique qui suit la mort de Staline, atome et coexistence occupent ainsi une place centrale.

 

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Notes:

 

5 Les Cahiers de Lénine sur Clausewitz, présenté par B. Friedl, Paris, Médicis, 1947.

6 Ces thèses sont notamment développées par Lénine dans L’Impérialisme, stade suprême du Capitalisme, publié en 1917.

7 KPSS o Voorujennykh Silakh Sovetskogo Sojuza (Le PCUS et les Forces Armées de l’Union soviétique), Moscou, Voenizdat, 1981, p. 25. Le décret est promulgué le 23 février 1918. Ce jour, considéré comme la date officielle de la création de l’armée rouge, devient le jour de la “fête de l’armée”.

8 Nezavisimaja Gazeta, 27 décembre 1995.

9 Ibid.

10 I. Stalin, Sotchinenija (Œuvres), Moscou, Gosizdat, tome 11, 1952, p. 288 (Discours au XVe Congrès du PC(b)R).

11 A. Svetchin, Strategija, Moscou, 1927, p. 45, cité dans A. Kokochin, Armija i Politika (Armée et politique), Moscou, MO, 1995, pp. 46-47.

12 M. Frunze, “Edinaja voennaja doktrina i krasnaja armija” (La doctrine militaire unique et l’armée rouge), article paru dans la revue Armija i Revoljucija, n° 1, 1921, in Izbrannye Proizvedenija (œuvres choisies), Moscou, Voenizdat, 1977, pp. 30-51.

13 “Transformer l’armée en un organisme monolithique soudé de haut en bas non seulement par une idéologie politique commune mais aussi par une unité de vues sur le caractère des problèmes militaires que doit affronter la république, sur les moyens de les résoudre ainsi que sur le mode d’entraînement des troupes au combat”. Cité par M. Gareev, Frunze, Voennyj Teoretik (Frounze, théoricien militaire), Moscou, Voenizdat, 1985, p. 75

14 M. Frunze, op. cit., p. 34.

15 Ibid., p. 34-35

16 A. Kokochin, op. cit., p. 42 (discours de L. Trotski au XIe Congrès du PC(b)R).

17 Ibid., p. 176.

18 Ibid., p. 180. Voir également S. de Lastours, Toukhatchevski, Paris, Albin Michel, 1996.

19 Ibid., pp. 82-85.

20 Ibid., p. 101.

21 Voir notamment Voennyj Enciklopeditcheskij Slovar’ (Dictionnaire militaire encyclopédique), Moscou, Voenizdat, 1986, (article “art opératif”), pp. 513-514.

22 Voennaja Akademija im. Frunze (l’Académie militaire Frounze), Moscou, Voenizdat, 1988, p. 85.

23 Cité par A. Kokochin, op. cit., p. 192. Triandafilov meurt dans un accident d’avion le 12 juillet 1931, soit peu de temps après la présentation de ce rapport.

24 Cité par A. Kokochin, op. cit., pp. 193-194

25 Ja. Golovanov, Korolev, fakty i mify (Korolev, faits et mythes), Moscou, Nauka, 1994, pp. 224-225 et pp. 249-251.

26 Voir notamment Krasnaja Zvezda, 6 décembre 1990.

27 J. V. Stalin, Œuvres, Stanford, 1967, tome 2 (XV), pp. 36-44 (cet ouvrage est la continuation, par la Hoover Institution, de la publication des œuvres de Staline, interrompue en URSS en 1952).

28 Ibid., p. 39.

29 Le lettre de Razin et la réponse de Staline, datées du 23 février 1946 sont publiées un an plus tard dans l’organe théorique du CC, la revue Bolchevik, n° 3, février 1947, pp. 4-7.

30 Dictionnaire encyclopédique militaire, op. cit., (article “bataille de Koursk”), p. 385

31 A part l’amiral Castex, en France, Bernard Brodie, William Borden ou George Kennan aux États-Unis et quelques autres, personne ne s’est réellement préoccupé de repenser la stratégie au regard de l’apparition de cette nouvelle arme.

 

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